Une réponse gouvernementale face aux VSS

En mai 2024, le ministère de la Santé a annoncé un plan national de lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) dans le secteur de la santé. Ces annonces ne sont pas tombées dans le vide : elles viennent répondre à des chiffres accablants, révélés au fil des enquêtes menées par les ordres professionnels et les institutions publiques. Une professionnelle de santé sur deux dit avoir subi au moins une forme de violence sexiste ou sexuelle dans sa carrière. Un chiffre qui n’est plus marginal, mais systémique.
Face à cette réalité, le plan repose sur quatre grands axes qui, combinés, visent à transformer à la fois les pratiques, les institutions et les mentalités. Ces mesures cherchent à réparer, à protéger, mais surtout à prévenir. Car c’est bien d’un changement de culture qu’il s’agit.

Les VSS à l’hôpital

Avant d’entrer dans le détail des mesures, il est essentiel de rappeler la nature des violences concernées. Les VSS dans la santé prennent des formes diverses : des propos sexistes banalisés en salle de garde aux agressions sexuelles en passant par les blagues graveleuses, les remarques sur l’apparence physique, les regards insistants ou les gestes déplacés. Ces comportements, parfois qualifiés de « culturels » ou de « traditionnels », sont en réalité des violences, aux conséquences graves et durables.

L’environnement hospitalier renforce la vulnérabilité des victimes. Le poids de la hiérarchie, l’épuisement professionnel, la promiscuité physique et la précarité des statuts – notamment chez les internes – créent un terrain propice au silence et à l’inaction. Les victimes hésitent à parler, les témoins se taisent, les auteurs ne sont que rarement inquiétés.

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Mesure 1 : Améliorer le traitement des signalements : l’efficacité au cœur de la réponse face aux VSS

La première mesure phare du plan consiste à renforcer les suites données aux signalements. Ce point répond à une critique largement partagée : trop souvent, les plaintes ou alertes n’aboutissent à aucune conséquence. Par peur, par manque de procédure claire, ou simplement par manque de volonté, les établissements de santé ont parfois laissé les affaires s’enterrer.

Le ministère entend y remédier en structurant mieux les procédures d’enquête et en facilitant les échanges entre les différentes autorités compétentes. L’objectif est double : d’un côté, assurer une réponse rapide et crédible aux victimes ; de l’autre, envoyer un signal clair que les faits ne seront plus tolérés ni ignorés. Car l’impunité nourrit la récidive. Lorsque les auteurs de violences ne sont ni écartés ni sanctionnés, c’est toute une organisation qui devient complice du silence.

Mesure 2 : Former l’ensemble des professionnels de santé : une obligation

La deuxième mesure du plan ministériel est tout aussi décisive. Elle rend obligatoire, d’ici trois ans, la formation de tous les professionnels de santé de la fonction publique hospitalière à la prévention des violences sexistes et sexuelles. Cette annonce, attendue depuis plusieurs années, s’inscrit dans la lignée des recommandations du rapport interministériel de 2024 et fait enfin de la formation un levier central de la politique de santé publique.

Car si les faits persistent, c’est aussi parce que beaucoup de professionnels – qu’ils soient victimes, témoins ou encadrants – ne savent pas comment les reconnaître, ni comment y réagir. Il ne suffit pas de vouloir bien faire : encore faut-il être outillé, informé, et soutenu. La formation vise donc autant à sensibiliser qu’à responsabiliser.

Elle permettra notamment de déconstruire les stéréotypes de genre, de clarifier les limites entre humour et violence, de connaître le cadre légal, et d’adopter les bons réflexes dès les premiers signaux. Cette mesure participe à créer un langage commun dans les établissements, une base de compréhension partagée qui est le socle de toute transformation culturelle.

Mesure 3 : Accompagner les victimes de VSS : un dispositif national externalisé

Troisième axe du plan : la création d’un dispositif de prise en charge des victimes, confié à une association spécialisée. Il ne s’agit plus seulement de prévoir des dispositifs internes au cas par cas, mais d’unifier et de professionnaliser l’écoute et l’accompagnement sur tout le territoire. Ce service sera indépendant, extérieur aux établissements, et accessible à toutes les personnes victimes de violences dans le cadre de leur travail dans le soin.

Ce changement est fondamental. Trop souvent, les victimes ont dû faire face seules à leur situation, sans soutien psychologique adapté, sans orientation juridique claire, ou avec le sentiment d’être jugées ou discréditées. Offrir une écoute spécialisée, c’est reconnaître la violence subie. C’est aussi restaurer la dignité de celles et ceux qui ont été abîmés par un système qui n’a pas su les protéger. Ce dispositif vise à éviter la double peine : être agressé·e, puis abandonné·e.

Mesure 4 : Mettre fin à l’omerta des VSS à l’hôpital : transparence annuelle et baromètre public

a quatrième mesure vise à instaurer une transparence structurelle sur les VSS dans la santé. Chaque année, un baromètre national publiera les données relatives aux signalements, aux suites données et aux sanctions prononcées dans les établissements. Cette transparence est un outil puissant pour sortir de l’ombre et briser la culture du secret.

Tant que les faits sont cachés, minorés ou niés, les victimes resteront seules, les auteurs intouchables, et le système en place inchangé. En rendant visibles les données, en les ventilant par région ou par établissement, le ministère pose un acte politique fort : il rend les institutions responsables.

Ce baromètre sera accompagné d’une obligation pour chaque établissement de santé de communiquer en interne sur ses propres chiffres, ses dispositifs de prévention et ses protocoles de prise en charge. Il ne sera plus possible de dire : « nous ne savions pas ».

Ce que ce plan change pour les hôpitaux dans la lute contre les VSS

Au-delà des grandes annonces, ce plan impose une transformation profonde de l’organisation des établissements de santé. Les directions devront se doter de référents bien formés, de procédures accessibles, de temps dédiés à la sensibilisation et à l’évaluation.

Pour les managers, ce plan est une boussole. Il confirme leur rôle clé dans la détection, la prévention et la gestion des VSS. Les managers ne sont pas des enquêteurs, mais ils doivent être formés pour reconnaître les signaux faibles, écouter sans juger, orienter sans retarder.

Pour les collègues, ce plan rappelle aussi leur responsabilité. Le soutien d’un pair, la réaction d’un témoin, la vigilance collective, tout cela peut faire la différence entre le silence et la protection. Le climat d’équipe est un facteur de risque ou de résilience : à chacun de choisir quel rôle jouer.

Changer la culture, pas seulement les procédures des violences sexistes et sexuelles

Ce plan ministériel, s’il est bien appliqué, marque une rupture. Pour la première fois, les violences sexistes et sexuelles dans la santé sont traitées comme un problème systémique, et non comme une série de cas isolés.

Mais pour que ces mesures produisent leurs effets, une mobilisation de tous les niveaux de la chaîne professionnelle est nécessaire : directions, référents, managers, collègues, et bien sûr, les victimes elles-mêmes.

Agir contre les violences sexistes et sexuelles commence par la connaissance.

Comprendre les différentes formes de VSS, c’est le premier pas vers un environnement de travail plus sûr, plus respectueux, et véritablement inclusif. Pour y parvenir, la sensibilisation, le respect du cadre légal et la formation continue sont essentiels.

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Les mesures contre les violences sexistes et sexuelles dans la santé

C’est un plan national de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les hôpitaux publics. Il comporte quatre mesures principales : renforcer les enquêtes, rendre la formation obligatoire, créer un accompagnement pour les victimes, et promouvoir une plus grande transparence.

Tous les professionnels de santé relevant de la fonction publique hospitalière doivent être formés dans un délai de trois ans. Cela inclut le personnel médical, paramédical, administratif et technique.

Oui. Il s’agit d’un service national, externalisé à une association spécialisée, et destiné à toute personne travaillant dans la santé publique, quels que soient son poste ou son statut.

Ils ne sont pas soumis aux mêmes obligations, mais le ministère encourage une harmonisation. Les établissements privés devront également démontrer leur engagement, notamment dans le cadre de leur certification HAS.

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